L’arrêt maladie est comme son nom l’indique un arrêt de travail destiné à permettre à un salarié malade de se soigner avant de pouvoir reprendre ses fonctions. Néanmoins certains salariés peu scrupuleux aidés par certains médecins peu regardants (ou dont la vigilance a été abusée), peuvent recourir aux arrêts maladie de complaisance afin, par exemple de bénéficier d’une semaine de congés payés supplémentaires…
Une telle pratique n’est pas sans écueil pour les employeurs tant au regard de l’image renvoyée à la communauté de travail qu’au regard des dépenses injustifiées qu’elle engendre.
L’employeur n’est toutefois pas démuni face à cela. Il dispose en effet d’un outil souvent méconnu qui est la demande de contre-visite médicale.
Sommaire :
- Qu’est-ce qu’une contre-visite médicale ?
- Quand solliciter une contre-visite médicale ?
- Comment solliciter une contre-visite médicale ?
- Comment se déroule la contre-visite médicale ?
- Quelles sont les issues de la contre-visite médicale ?
1) Qu’est ce qu’une contre-visite médicale ?
La contre-visite médicale est la visite médicale réalisée par un médecin choisi par l’employeur, en vu de contrôler le bien-fondé de l’arrêt maladie d’un salarié. (Articles L.1226-1 du Code du travail et L.315-1 du Code de la sécurité sociale)
Elle ne peut être demandée par l’employeur que lorsqu’il a l’obligation de maintenir le salaire du salarié malade en vertu des dispositions légales ou conventionnelles.
2) Quand solliciter une contre-visite médicale ?
Elle peut être réalisée à chaque fois que vous avez un doute relatif au bienfondé d’un arrêt maladie.
A titre d’exemple il convient de noter que le fait de faire procéder dans une période de trois mois à trois contrôles médicaux visant à vérifier si l’état de santé de l’intéressée le justifiait, participe à établir l’existence d’éléments permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral. (Cass. Soc. 13 avril 2010, n°09-40837)
Par ailleurs, elle ne peut pas intervenir avant le début du maintien de la rémunération légale ou conventionnelle.
Elle ne peut donc pas être réalisée:
- durant le délai de carence. (article D.1226-3 du Code du travail);
- lorsque le salarié ne remplit pas encore les conditions légales ou conventionnelles d’octroi du maintien de salaire.
3) Comment solliciter une contre-visite médicale ?
Sauf disposition conventionnelle contraire, l’employeur est libre de choisir le médecin chargé du contrôle.
Il peut ainsi aussi bien :
- avoir recours à une entreprise de contrôle privée;
- que réaliser une demande de contrôle par l’intermédiaire de la sécurité sociale. Demande de contrôle médical de votre salarié
4) Comment se déroule la contre-visite médicale ?
Pas de délai de prévenance ni de contrôle contradictoire – Sauf dispositions conventionnelles contraires:
- l’employeur et le médecin contrôleur ne sont pas tenus de prévenir le salarié de la survenance d’une contre-visite médicale. (Cass. Soc. 20 janvier 1999, 96-45023)
- la contre-visite n’a pas à être contradictoire. Ainsi, le salarié ne peut en principe pas exiger la présence de son médecin traitant. (Cass. Soc. 28 septembre 1983, n°81-40008)
Le lieu de la contre-visite médicale – La contre-visite médicale se déroule au domicile du salarié ou en tout lieu de repos autorisé par la sécurité sociale sous réserve dans ce second cas d’en avoir avisé au préalable son employeur.
L’heure de la contre-visite médicale – La contre-visite médicale peut intervenir à tout moment en dehors des horaires de sortie autorisées par la sécurité sociale et prescrites par le médecin traitant.
Le déroulé de la contre-visite médicale – Lors de la visite, le médecin contrôleur est tenu de se présenter et de décliner sa qualité de médecin et de mandataire de l’employeur.
A défaut, le salarié est en droit de s’opposer à la visite.
Si le médecin est en droit d’examiner le salarié, il ne peut en revanche pas le contraindre à réaliser un examen clinique très douloureux alors que le salarié met à sa disposition son dossier médical et ses comptes rendus opératoires. (Cass. Soc. 13 février 1996, n°92-40713)
5) Quelles sont les issues de la contre-visite médicale ?
Hypothèse 1 : L’arrêt de travail est confirmé
L’employeur doit alors maintenir le salaire dans le respect des dispositions légales et conventionnelles.
Hypothèse 2 : L’arrêt de travail est injustifié
Du point de vue de l’employeur, si le médecin contrôleur conclu au caractère injustifié de l’arrêt ou fait état de l’impossibilité injustifiée de procéder à l’examen de l’assuré, alors l’employeur peut cesser de maintenir le salaire à compter du contrôle.
Il ne peut en revanche pas demander le remboursement du maintien de salaire indument versé avant le contrôle. Les effets de celui-ci ne sont pas rétroactifs.
Il ne peut pas non plus sanctionner le salarié et encore moins le licencier à ce titre.
Du point de vue de la sécurité sociale, dans ce cas de figure, le médecin contrôleur transmet son rapport au service du contrôle médical de la caisse dans un délai maximal de quarante-huit heures. Le rapport précise si le médecin diligenté par l’employeur a ou non procédé à un examen médical de l’assuré concerné. Au vu de ce rapport, ce service :
1° Soit demande à la caisse de suspendre les indemnités journalières.
2° Soit procède à un nouvel examen de la situation de l’assuré. Ce nouvel examen est de droit si le rapport a fait état de l’impossibilité de procéder à l’examen de l’assuré. (Article L315-1 CSS)
Hypothèse 3 : Le contrôle n’a pas pu être réalisé
Il convient de distinguer selon que la cause de l’impossibilité est ou non justifiée.
- Si l’absence du salarié ou le refus opposé est justifié – alors l’employeur demeure tenu du versement du maintien de salaire dans le respect des dispositions légales et conventionnelles. (Par exemple si le contrôle est réalisé pendant les heures de sortie autorisée par le médecin traitant ou encore si le salarié fait l’objet d’une hospitalisation au moment du contrôle.)
- Si l’absence du salarié ou son refus n’est pas justifié – dans ce cas, l’employeur peut cesser de verser le maintien de salaire dans les même conditions que lorsque le contrôle a révélé un arrêt injustifié.
La contre-visite médicale est un outil pour lutter contre l’absentéisme. S’il ne faut pas hésiter à y recourir à cette fin, attention toutefois à ne pas en faire un usage abusif !